Les Objectifs du Millénaire pour le développement et l’agenda post-2015 pour le développement

Istanbul, Turquie, 08 – 09 novembre 2013

Discours de Ouafa Hajji, Présidente de l’Internationale socialiste des Femmes, ISF

Cheres camarades Je suis extrêmement heureuse que notre réunion se tienne ici à Istanbul. C’est dans cette belle ville tournée vers deux mondes, l’orient et l’occident, que la Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, a été signée en avril 2011. Je ne peux m’empêcher d’y penser même si ce n’est pas l’objet de nos travaux aujourd’hui car ce texte fondamental est le premier instrument juridiquement contraignant en Europe et qui je l’espère transcendera ses frontières.

C’est aussi dans cette ville que nous nous réunissons aujourd’hui pour contribuer, à notre niveau, celui de l’ISF, aux objectifs du millénaire et l’agenda post 2015.

Avant d’aborder les themes de notre reunion, j’aimerais exprimer a nos camarades et soeurs du Parti republicain du peup,e de Turquie toute la solidarite et le soutien de l’ISF au combat qu’elles menent aujourd’hui face aux tentatives de remise en cause du statut des femmes, de leurs droits, dignite et de leur liberte. Ces droits que les femmes de Turquie ont acquis depuis longtemps et qui font partie de l’histoire de ce pays, de sa civilisation. Ces tentatives de regression, largment combattues grace a votrecourage et votre abnegation.

Chers camarades,

Vous me permettrez de rappeler brièvement que le Sommet du Millénaire, du 6 au 8 septembre 2000 au siège de l’ONU à New York, a été le plus grand rassemblement de chefs d’État et de gouvernement de tous les temps. Il s’est conclut avec l’adoption par les 189 États Membres de la Déclaration du Millénaire, dans laquelle ont été énoncés les huit objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). L’engagement de tous est leur réalisation au 31 décembre 2011 :

  1. Éliminer l’extrême pauvreté et la faim
  2. Assurer l’éducation primaire pour tous
  3. Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes
  4. Réduire la mortalité des enfants de moins de 5 ans
  5. Améliorer la santé maternelle
  6. Combattre le VIH/Sida, le paludisme et d’autres maladies
  7. Assurer un environnement durable
  8. Mettre en place un partenariat mondial pour le développement

8 objectifs, 21 cibles spécifiques et 48 indicateurs économiques et sociaux pour mesurer les progrès réalisés.

Nous sommes aujourd’hui, à moins de 800 jours de la date d’échéance. Les différents rapports des Nations Unies sur la question nous informent que d’énormes progrès ont été réalisés mais aussi que le chemin qui reste à parcourir est encore très long. Le premier rapport de la Task Team des Nations Unies (composée d’experts de plus d’une soixantaine d’agences onusiennes) révèle les forces et les faiblesses des OMD, qui seront essentielles à prendre en compte dans la définition de l’agenda du développement de l’après 2015.

Parmi les meilleurs résultats, je ne citerai que : (1) La réduction de l’extrême pauvreté sur le plan mondial de moitié, soit 700 millions de personnes en moins vivant dans des conditions d’extrême pauvreté en 2010 qu’en 1990. (2) L’accès de plus de 2 milliards de personnes à des sources d’eau potable améliorées. (3) Des progrès remarquables dans la lutte contre le paludisme et la tuberculose. (4) La diminution du taux de personnes sous alimentée à 23.2% entre 1990-1992 à 14.9% en 2010-2012.

(5) De plus en plus de femmes dans le monde sont des élues et siègent dans les parlements et ce grâce au système des quotas. (6) La représentation proportionnelle a permis l’augmentation du nombre des femmes parlementaires (25 %) en 2012 plus que le système au scrutin majoritaire (14 %) ou une combinaison de ces deux systèmes (18 %). (7) La mortalité maternelle a été réduite de moitié par rapport à 1990 passant de 400 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes en 1990, à 210 décès en 2010.

Parmi les résultats les moins bons et qui nous touchent de plus près au sein de l’ISF, je citerai : (1) Si le taux mondial de mortalité des enfants de moins de cinq ans a diminué de 41 %, plus de 100 millions d’enfants souffrent encore de sous alimentation. (2) L’inégalité des sexes au niveau du pouvoir décisionnel persiste. Les femmes n’ont toujours pas droit à la parité avec les hommes pour prendre part aux décisions qui affectent leur vie. (3) Dans 63 pays, les filles courent plus le risque d’être non scolarisées que les garçons dans les groupes d’âge du primaire et du premier cycle du secondaire. (4) Dans tous les pays en développement, les femmes ont des emplois moins sécurisés que les hommes et dans beaucoup de pays développés ou sous développés les salaires sont très inégalitaires pour le même travail.

Cheres camarades

La réduction de la pauvreté a été la plus rapide de l’histoire de l’humanité mais le chemin vers son éradication est encore long. Les membres du Groupe de personnalités de haut niveau chargé du programme de développement pour l’après-2015, à qui je tiens à rendre hommage pour leur rapport (mai 2013), ont fait le constat que les questions de développement durable de l’environnement, d’employabilité et de travail décent et d’inégalités doivent être au cœur de l’après 2015. Les OMD n’ont accordé que peu de place aux catalyseurs du développement et les conjonctures nationales et régionales n’ont pas facilité la tâche. (Titre du rapport : Pour un nouveau partenariat mondial : Vers l’éradication de la pauvreté et la transformation des économies par le biais du développement durable).

Les membres du Groupe ont été à l’écoute de milliers de personnes (à travers les enquêtes et les rapports) et sur la question féminine voilà leur conclusion : « Les femmes et les jeunes filles ont insisté sur la protection de leur droit à la propriété et de leur accès à la terre ; elles veulent en outre que leur voix soit entendue et participer à la vie économique et politique. Elles ont également demandé au Groupe d’œuvrer pour mettre fin aux violences contre les femmes et à la discrimination sur le lieu de travail, à l’école et dans le droit ».

Je tenais à vous lire cette conclusion qui restitue de manière si simple les vœux de toutes les femmes particulièrement celles qui aspire à plus de droits et dont on n’entend pas la voix. Je pense aux femmes du printemps arabe et j’oserais dire que dans leur cas ce qui se fait sans elle se fait contre elle.

Cheres camarades,

Comment allons-nous tous ensemble nous investir dans ce nouvel agenda unifié de développement durable ? Telle est la véritable question qui se pose aujourd’hui à l’ISF dans un contexte difficile ? Depuis cinq ans, le monde connaît une crise économique sans précédent. Les femmes sont les plus touchées par la crise et les politiques d’austérité qui s’ensuivent. En outre, plusieurs pays subissent des crises politiques, je pense à l’Afrique subsaharienne et au monde arabe). Ce contexte, auquel s’ajoutent les changements climatiques, complique les choses mais nous ne pouvons l’utiliser comme prétexte pour ralentir nos efforts. Il doit bien au contraire nous motiver pour continuer à éclairer, par nos travaux et nos résolutions, des actions politiques cohérentes en faveur des femmes.

Le défi qui se pose à l’ISF aujourd’hui est un effort de réflexion prospectif et d’anticipation afin d’offrir à la moitié de la population mondiale (les femmes), dans le nouvel agenda, des perspectives prometteuses tant les domaines économique, social qu’environnemental, les trois piliers du développement durable. Comment les femmes peuvent participer au développement durable ? Le rapport de la Task Force des Nations unies sur l’éducation et l’égalité des sexes reconnaît que le développement ne peut avoir lieu sans l’autonomisation des femmes.

Les questions sont nombreuses et multiples et la journée qui nous attend sera longue. Je suis confiante de la part que nous pouvons apporter au nouvel agenda dans lequel l’égalité entre les hommes et les femmes ne devra être ni limitée ni lacunaire.

 

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